» . Vrac de Textes

Fut une époque, guère si lointaine, où j'écrivais beaucoup. Voiçi donc quelques débuts (avortés) d'histoires non finies. En vrac.

Chapitre 1 :

De toutes les familles qui sortaient de l’ordinaire, celle des Blisval était certainement la plus incroyable. Leur maison, si toutefois on pouvait encore appeler ça une maison, se nichait au cœur d’un bois, sur la côte bretonne. C’était une étrange bicoque aux murs autrefois blancs, au toit sombre. La façade, en partie masquée par l’épaisse végétation environnante, était percée de quelques fenêtres. Lorsqu’on voyait le tout, on se mettait à douter des compétences de l’architecte qui avait pu lui faire voir le jour.
Cette maison s’élevait donc au milieu d’un jardin en friche et d’un vieux bois. Seule la cheminée de pierre dépassait la cime des arbres et faisait savoir aux gens de passage qu’un peu de vie subsistait dans les environs. En effet, le plus proche hameau se trouvait à une vingtaine de kilomètres au sud. Bien que la mer ne fût pas loin, la région n’avait jamais attiré que les oiseaux en tout genre. Mais on n’y avait pas vu le moindre bermuda de touriste depuis des temps particulièrement reculés.
C’était donc ici que vivait la famille Blisval. Plus exactement, la fratrie des sept enfants Blisval. Six filles et un garçon.
Depuis aussi loin que leur mémoire remontait, ils avaient toujours vécu ici. Depuis l’aînée, Agnès, jusqu’à la benjamine, Solenn. L’échelle des âges s’étalait de 4 à 26 ans. Pas plus. Il était inutile de chercher les parents, ils n’y étaient pas. Anne et Philippe Blisval avaient disparu 3 ans plus tôt lors d’un accident. Disparus en mer. Triste coup du sort. Il avait alors fallu se serrer les coudes et, afin de pouvoir conserver intacte la fratrie, Agnès avait abandonné ses études, et avait pris en charge la vie d’Eléonore, 19 ans, de Louise, 16 ans, du jumeau de celle-ci, Elhia, d’Anita, 10 ans, de Maëlis, 6 ans, et de Solenn, 4 ans. Pour quelqu’un qui ambitionnait une carrière d’actrice internationale... C’était plutôt loupé.
Entre autre, la petite famille se composait aussi de deux ou trois chats, selon l’humeur du jour mais surtout selon la température affichée au thermomètre, et de quelques souris (il y avait les souris en cage de la petite Anita, mais surtout celles, plus nombreuses, de la charpente).
Comment entretenir une maison et une famille de 7 personnes alors qu’on n’avait pas de travail ? C’était la question que s’était maintes fois posée Agnès. Et pourtant, le tout marchait. La maison tenait (encore) debout et les estomacs ne criaient pas (trop) famine.

Cependant, jamais les Blisval n’avaient regretté le choix de leur aînée. Se savoir tous ensembles, sous le même toit, aussi bancal soit-il, était pour eux source de grand réconfort. Même si, parfois, certains trouvaient à redire.

Chapitre 2 :

Ce fut un hasardeux rayon de soleil qui, ce matin de décembre, réveilla Louise. Elle fronça le nez, se retourna en tirant sur elle l’édredon de plumes. Un grognement suivit et la jeune fille sentit l’édredon lui glisser des mains. Elle l’agrippa plus fermement et tira. Une tête échevelée jaillit de l’oreiller voisin.
- Laisses-en un peu ! gémit Anita.
Cette dernière poussa sa sœur, qui répondit par un cri indigné.
- Y a pas que toi, sur Terre, ma petite !
Louise tira de plus belle. Anita se jeta sur elle et mordit férocement sa main, lui faisant lâcher prise. Elle lui adressa alors un sourire moqueur et enfouit sa tête dans l’oreiller.
Louise frissonna de colère.

Chapitre 1 :

Il était environ une heure du matin lorsque la sonnerie du téléphone retentit dans la petite chambre d’Elsa Fromentier. À tâtons, elle chercha sa paire de lunettes. Posant enfin sa main dessus, elle les ajusta sur son nez. Tout à coup, tout lui parut plus clair. Elle saisit le téléphone tout en se redressant. Une voix revêche grommela lorsqu’elle décrocha.
« Ah, enfin !
-Moi aussi je suis heureuse de vous parler, commissaire Meriadec. Non, vraiment.
-Ce n’est pas le moment de plaisanter, Fromentier ! Je vous veux devant la Hoguette, dans 30 minutes ! Pas une de plus ! »
Avant qu’elle n’ait eu le temps de répliquer, la conversation fut interrompue. Sachant bien ce que lui coûterait une désobéissance, elle se leva et traîna les pieds jusqu’à la salle de bain. En apercevant son reflet dans le miroir, elle soupira et passa une brosse dans ses cheveux pour tenter de les démêler. Après une toilette sommaire, elle sortit de l’appartement et gagna la rue. Il faisait nuit noire dans les rues de St Malo. La circulation se faisait. La jeune femme jura lorsqu’elle voulut ouvrir sa petite voiture.
« Bon sang, ils me l’ont encore fracturée ! »
En effet, la serrure n’était plus qu’un trou béant et la portière pendait misérablement à ses gonds. De rage, elle donna un coup de pied à la roue, ce qui eut pour effet de déclencher le cri strident de l’alarme. Elsa se prit la tête dans les mains, contenant mal son énervement. Elle fit demi-tour et partit à pied vers le Sillon.

Loïc Meriadec grogna, comme à son habitude, en regardant sa montre.
« Mais qu’est ce qu’elle fout, bon sang ? »
Il entendit un bruit de pas sur le ciment et marcha jusqu’à la digue. Il tendit la main à la jeune femme qui sauta dans le sable. Elle rougit et murmura :
« Je suis vraiment désolée, commissaire, c’est ma voiture...
-Je ne veux pas entendre vos excuses, Fromentier ! Suivez-moi, nous avons plus urgent. »
Il partit d’un pas vif et nerveux et elle le suivit. Plusieurs policiers en uniforme se massaient déjà près de l’eau, au pied du remblai de la Hoguette. Le commissaire en écarta deux d’une main ferme et fit passer Elsa. Un jeune homme, accroupi dans le sable, se releva. Il lui tendit la main, qu’elle serra vigoureusement. Antoine Gravelet, jeune légiste tout juste sortit de l’école, aimait beaucoup sa jeune collègue. Il appréciait son enthousiasme, sa joie de vivre contagieuse. Elsa n’était pourtant pas le genre de ‘femme à hommes’. Elle était plutôt petite et ronde, le cheveux noir et frisé, la peau blanche. Mais son humour séduisait, sa franchise étonnait puis ravissait.
Il n’y avait guère échappé. Elsa lui sourit.
« Je peux récupérer ma main ? »
Il eut un petit sourire contrit et lâcha ses doigts. Nerveusement, il remit ses cheveux en arrière et enfila une paire de gants.
« Désolé. »
Elle s’accroupit et observa silencieusement. Une jeune femme gisait dans le sable, les yeux grand ouverts, la bouche contractée.
« À première vue, elle n’avait pas plus de 30 ans. »
Elsa déglutit. Son âge, ou presque..
« Pas de signes de violences, quelles qu’elles soient. »
Il souleva les cheveux.
« Pas de marques de strangulations. Je ne crois pas non plus qu’elle se soit noyée ou ait été étouffée. Mais seule une analyse complète nous le révèlera.
-Je peux ? »
Personne ne retint la main d’Elsa lorsqu’elle ferma les paupières de la jeune femme. Le commissaire la prit par l’épaule et la releva. Il l’emmena à part.
« Vous la connaissiez ? »
Elsa n’aimait pas se sentir brusquée et se braqua quelque peu. Il répéta sa question une seconde fois.
« Est-ce que vous la connaissiez, Elsa ? »
Elle renifla.
« De nom. De vue aussi... murmura-t-elle.
-Dans ce cas, pourriez-vous me donner son identité ? »
Elle rejeta ses cheveux en arrière d’une main.
« Cela m’étonne que vous ne sachiez pas qui elle est. Je pense que c’est Anne-Sophie Loisellière, l’une des filles du vieux Joseph Loisellière. Le grand avocat. »
Il eut un hoquet de surprise.
« Une de ses filles ? Joseph Loisellière ? Mais bon Dieu c’est la famille...
-La plus influente et la plus riche de la région, oui, le coupa-t-elle. »
Une goutte de sueur coula sur son front. Elle allait faire demi-tour lorsqu’il attrapa son bras.
« Je vous charge de l’enquête, Fromentier. Je ferais en sorte que Gravelet vous envoie les résultats d’analyse le plus vite possible. »
Elle haussa les épaules. Elle s’en doutait. Alors qu’elle repartait vers le corps, il la retint encore une fois.
« Et c’est vous qui irez parler à la famille. »
Avant qu’elle ne puisse répliquer, il s’était déjà éclipsé. Elle s’agenouilla de nouveau auprès de la jeune femme. Tout à coup, à la lueur d’une lampe, un éclat attira son attention. Elle dégagea de la paume une chaînette d’argent. Au bout de celle-ci pendant une bague. Elle la prit entre ses doigts, délicatement, cherchant à faire apparaître le moins d’empreintes possible. Elle tenait un sceau d’argent, ovale. En regardant, on pouvait distinguer quelque chose de gravé. Un demi ovale entourant un trèfle à quatre feuilles. Elle se releva et le tendit au légiste. Il le prit dans ses gants, l’observa et le laissa tomber dans un sachet plastique qu’il ferma aussitôt. Elsa l’interrogea du regard.
« Peut-être n’en as-tu jamais entendu parler... »
Il passa le sachet devant les yeux de l’enquêtrice.
« On l’appelle ‘la double chance des Loisellière’. C’est l’écusson de leur famille depuis... »
Il toussota.
« Hum... Une époque dont ils ne parlent que rarement. »
Elsa dû se contenter de cette réponse, malgré son insistance. Les mains dans les poches, elle partit.

Chapitre 2 :

Lorsqu’elle se réveilla le matin, la journée était déjà bien entamée. Le soleil perçait à travers les rideaux et inondait la pièce. Elle se rendit compte qu’elle s’était recouchée tout habillée. Elle était revenue extenuée et sonnée par la macabre découverte de ses collègues et s’était effondrée sur son lit. Elle avait mal au crâne lorsqu’elle se mit debout, et dû avaler un cachet d’aspirine avant de pouvoir espérer rassembler ses idées. Lorsqu’elle fut assise à sa table, tout lui revint en mémoire. L’appel au beau milieu de la nuit, la marche jusqu’à la grève, le corps ensablé d’Anne-Sophie Loisellière. Elle se servit un verre d’eau, qu’elle but d’une traite. Sa gorge était en feu, ainsi que ses entrailles. Elle regarda par la fenêtre, la rue tout en bas. Après avoir ouvert le battant, elle gagna la salle de bain, afin de se passer un coup d’eau sur le visage puis s’habiller. S’asseyant sur le bord de la baignoire, elle regarda sa montre.
« Midi.. Je ferais mieux d’aller parler à la famille avant que des journalistes ne s’en chargent. »
Elle mit un sac sur son dos et quitta l’appartement en fermant la porte derrière elle. Une fois sur le trottoir, elle renonça à ouvrir sa voiture et saisit son téléphone portable. Après avoir appelé un garagiste, elle partit vers l’arrêt de bus. Malgré la douceur de l’air, Elsa frissonnait. Alors qu’elle attendait, le téléphone se mit à vibrer.
« Mlle Fromentier ? »
Elle passa la main dans ses cheveux.
« Antoine Gravelet, à l’appareil. Vous pourriez passer au labo ?
-Je.. Je me dépêche, murmura-t-elle. »
Elle raccrocha et se leva. Elle n’avait pas besoin d’attendre le bus, le labo était à deux pas. Elle remonta la rue et, quelques minutes plus tard, poussa la porte. Elle montra brièvement sa carte d’inspectrice au gardien de l’entrée, puis monta quatre à quatre les marches de l’escalier principal. Elle entra dans un long couloir et marcha jusqu’au bout, jetant un coup d’œil à travers les portes ouvertes.

D'autres à venir si j'arrive à les retrouver, mon ordi buggue.